Le bal des pavés

mai 11th, 2011

 

 

LE   BAL   DES   PAVES

 

 

Nous, les pavés de Paris, on dit :

 

y-en a marre d’être des carrés gris

piétinés roulés et froissés,

bons gros dodus bien balayés

 

Notre tête a aussi des angles très pointus

On est des cubes, saviez-vous ?

à quatre becs très affamés

picoreurs d’yeux et boucliers

 

Pas besoin d’ailes pour voler,

vos bottes les ont écrasées

Mais à l’école des grenades

on a pris goût aux promenades

 

En l’air on se croise en sifflant

c’est le ballet des balayés

On aime bien voir des idées

des flics et des étudiants

 

Amis pavés, déterrez-vous,

montrez vos cinq faces cachées

et vos huit coins bien décidés.

 

Les pavés ont envie de danser

la valse libre des pavés

les pavés ont envie de jouer

les pavés ont assez hiberné.

 

On va danser à en crever

on se réveillera goudronnés

mais on n’oubliera jamais

qu’on a des coins et des côtés.

 

 

Ainsi valsaient les pavetons

sur les archets du printemps

ont ébranlé les maisons

puis sont rentrés dans le rang.

 

Maintenant la lune rit

l’alouette est dans son lit

l’ombre brise l’arbre en tranches

la feuille a quitté sa branche

 

L’aube chante des ave

pour les gros petits pavés

les orteils endoloris

ils fuient comme des souris

 

Dans leur trou sont retombés

bien cachés le dos courbé

le cantonnier est passé

les a tous cousus serrés

 

Désormais la nuit est nue

l’arbre est froid comme un tuyau

La lune a perdu son halo

et la mort rit dans la rue.

 

Les pavés ne dansent plus

le printemps soudain s’est tu

 

 

Vents de la vie, vous seuls savez

combien faudra-t-il attendre

avant qu’enfin on ré-entende

 

la chanson libre des pavés ?

 

 

 

 

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